« En vérité, le chemin importe peu, la volonté d'arriver suffit à tout. »
Le Mythe de Sisyphe - Albert Camus
A dire vrai, je continue de me poser la question....
Vous voilà bien avancés !!
Bien, alors, peut-être pourrais-je me définir comme une atypique dont rien ne stimule plus la curiosité qu'un interdit arbitraire. L'arbitraire et le préjugé sonnent à mes oreilles au mieux comme une inepsie, au pire comme une injustice et me donnent systématiquement, allez savoir pourquoi, l'impérieuse envie de les franchir. Interdisez-moi un accès et vous créez instantannément un défi.
Hélas, je suis une fille ! Aussi imaginez tous les arbitraires dont on m'a abreuvée, tous les préjugés qu'on a essayé, en vain, je le précise, de m'inculquer, tous les interdits enfin qu'on m'a posée.
Je crois que les racines de mon métier sont nées dans ce jardin du morbihan, le nez collé à la vitre de l'établi de mon grand-père. Il bricolait pour ainsi dire tous les jours et mon grand frère, ainsi que mes cousins, y amenaient, fréquemment, un objet à réparer, en l'occurence, bien souvent des maquettes.
Aussi, toute petite fille, j'ai évidemment voulu suivre la troupe qui s'agglutinait dans cette pièce aux milles curiosités. Et ce fut un non arbitraire. Non, c'est dangereux ! Et bien sûr, derrière ce non, il y avait le préjugé que les petites filles jouent à la poupée et les petits garçons apprennent à bricoler.
Oui, mais moi, les poupées ça ne m'a jamais vraiment intéressée et je ne voyais vraiment pas pourquoi ce qui était dangereux pour moi ne l'était pas pour les garçons de la famille.
Dès lors, l'établi prit l'aspect d'une caverne d'Ali Baba dont on me privait arbitrairement. Aussi, lorsqu'il était désert et que mon grand-père avait oublié de le fermer, je m'y introduisais, savourais les effluves de sciure et de colle, entrouvrais le placard des outils, caressais des yeux l'établi avec en tête toute cette injustice : pourquoi pas moi ?!!
Ma vie ne fut pas un long fleuve tranquille, loin s'en faut, aussi je vous en ferai grâce. Et pendant trop longtemps, mon destin m'a enfermée dans une profession où je me suis ennuyée ferme et qui ne pouvait m'aller plus mal. Secrétaire de Direction, tout ce que je déteste : les horaires, la hiérarchie, la paperasse. Sans parler des crises de réunionites qui m'apparaissaient aussi aïgues que répétitives et stériles. Enfin, en un mot, je n'étais ni faite pour le monde de l'entreprise, ni pour ce métier. C'est donc après la naissance de ma fille que j'ai décidé de plaquer la machine à café et tout ce qui l'entourait.
Bricoler, j'y passais mes weekends depuis mes 19 ans. Ah, quel bonheur je trouvais à clouer, percer, peindre, découper, coller : de l'oxygène, enfin ! Alors, bien sûr, l'idée de me tourner vers l'artisanat fut toute naturelle. Et j'ai eu la grande chance de trouver 2 rempailleurs de chaises qui l'un m'apprit les grandes bases du métier et l'autre m'offrit l'opportunité d'être apprentie.
Ce fut véritablement une chance quant on sait que les véritables pailleurs-canneurs traditionnels sont aujourd'hui extrêmement rares, probablement autour de 150 en France.
Ce métier, bien qu'il soit encore considéré comme un petit métier, est un métier d'art à part entière et d'ailleurs répertorié comme tel. Autant dire que l'apprentissage est long et les techniques précises. De la patience, il en fallut de tous bords pour faire de moi un professionnel du rempaillage et cannage. Les heures consacrées à cet apprentissage se chiffrent en milliers. Et parfois je me demande si la somme des cordons que j'ai tourné et de la canne que j'ai tissée, ne permettrait pas de traverser la France !
J'ai ouvert les portes de mon atelier en 2006, voici 18 ans aujourd'hui. Je pourrais faire valider mon expérience par un joli bout de papier qui m'introniserait maître artisan. Mais, bon, entre nous, je préfère vous démontrer mon savoir-faire sur vos chaises. Les papiers, j'en ai assez vu dans ma vie !
Ce sera avec plaisir que je vous accueillerai dans mon atelier.
Mais, pour le moment, je vous laisse découvrir ce site qui cherche à vous dévoiler un peu de mon beau métier....